Ce que High Flight propose

Deux types de travaux

L’analyse de l’intérêt marqué que porte le public francophone à la Seconde Guerre mondiale et des témoignages filmés qui sont accessibles à ce dernier montre un décalage, voire un gouffre.

Sans grand risque de se tromper, l’on peut classer ce public en trois grandes catégories tout comme les produits dont celle-ci ont besoin.

La première est le grand public qui a besoin de films achevés, que ceux-ci soient consacrés au vécu d’un témoin unique ou que, d’une manière plus générale, ils soient dédiés à une thématique plus large qui s’appuie sur des témoignages.

La seconde est celle des individus ou structures qui ont besoin de ces témoignages non pas uniquement pour satisfaire leur curiosité et leur soif d’apprendre mais pour faire avancer la connaissance des faits : les chercheurs, les étudiants et les journalistes – du moins ceux d’entre ces derniers qui ont à cœur de s’appuyer sur des sources. Ceux-là ont besoin de matière de recherche brute, exhaustive, et non de produits finis qui s’appuient sur une sélection, forcément subjective même si elle est placée sous le signe de l’honnêteté intellectuelle. En d’autres termes, ce public-là a besoin d’accéder aux rushes.

La troisième consiste en les structures commerciales qui souhaiteraient accéder à ces mêmes rushes afin de produire leurs propres films commerciaux destinés à être diffusés.

L’objectif que se donne High Flight est de partager le plus grand nombre possible de témoignages avec le public le plus large possible. Cet objectif impose de proposer au public les coûts d’accès les plus faibles possibles, à savoir la gratuité pure et simple. Il rend en revanche raisonnable l’idée de facturer des droits aux structures commerciales qui souhaiteraient exploiter nos images à des fins de rentabilité. Cela permettrait à l’association de créer une trésorerie permettant de multiplier les initiatives nouvelles.

L’ensemble de ces propositions doit donc tenir compte du subtil équilibre nécessaire entre un souhait démocratique – faciliter l’accès à l’information – et une contrainte de trésorerie – facturer les mêmes matériaux aux acteurs purement commerciaux – à des fins de pérennisation du travail de l’association High Flight.

Le détail de ce panel de modes d’accès est en cours d’élaboration et, bien entendu, figurera d’une manière claire et détaillée dans les statuts juridiques de l’association.

Des témoignages mis en contexte

Pour ce qui est des produits destinés à tous les publics, c’est-à-dire des produits finis prêts à diffuser, l’association High Flight se propose de s’imposer une série de critères qui nous semblent aller dans le sens de ce qui manque aux témoignages filmés existants et de ce que souhaite, le croyons-nous, le public français ou francophone.

Le premier d’entre eux est celui de la mise en contexte. Nous pensons qu’un témoignage isolé du contexte des événements qu’il raconte est de nature à perturber l’entendement des événements par le spectateur. En effet, les témoins sont subjectifs – ce que l’on ne saurait leur reprocher et qui fait précisément l’intérêt de leur témoignage – mais la présentation du témoignage se doit, selon nous, d’être neutre. Pour illustrer à l’aide d’un exemple connu, imaginons le témoignage d’une Normande évoquant la terreur des bombardements aériens tactiques alliés pendant l’opération OVERLORD. Aujourd’hui, pour des raisons morales évidentes, un nombre grandissant de voix s’élève en France – mais pas seulement – contre ces bombardements massifs qui ont écrasé sous les bombes des villes entières et fait purement et simplement disparaître certains villages des cartes routières. Un tel sujet filmé se devra de signaler que ces destructions d’infrastructures et de noeuds de communication ont aussi, dans les faits, considérablement handicapé les forces allemandes et donc contribué à leur défaite et donc à celle de l’idéologie nazie que celles-ci incarnaient. Notons qu’il ne s’agit pas, dans cet exemple, decontredire le témoin – les souffrances atroces qu’il évoque sont bien réelles, mais bien de rendre compréhensible les éléments qui ont conduit à la tragédie qu’il a vécu, charge à celui qui recueille ses paroles de donner à la fois force à son récit et sens au sujet que ce dernier illustre.

Rigueur et neutralité

Cette contrainte de mise en contexte n’est que l’un des piliers d’une approche qui se veut neutre dans tous les sens du terme. En premier lieu, les travaux de l’association High Flight se refusent à tout prosélytisme et à promouvoir quelque modèle moral, culturel, religieux, social, philosophique ou économique que ce soit. De la même manière, il s’interdit de faire la promotion d’une approche au détriment des autres. Même si l’approche purement militaire est la première à laquelle on pense s’agissant d’une guerre, les approches sociologique, culturelle, religieuse, géopolitique, économique, industrielle, technologique, financière et même monétaire ne peuvent en aucun cas être écartées a priori. En d’autres terme, même si le témoignage d’un combattant est essentiel, celui d’un fonctionnaire, d’un ingénieur, d’un entrepreneur ou d’un ecclésiastique présente tout autant d’intérêt. L’ouverture à la pluridisciplinarité nous paraît de nature à induire une synergie dans l’appréhension de la Seconde Guerre mondiale, synergie jusqu’ici absente des approches auxquelles le public français est habitué.

Enfin, ce souci de rigueur exclut bien entendu l’exploitation de témoignages dans le but de colporter des visions démontrées comme erronées par les historiens les plus exigeants comme, pêle-mêle : les campagnes de Pologne de 1939 et de Russie de l’été 1941 sont des promenades militaires pour la Wehrmacht ; le matériel français de 1940 est obsolète ; la Wehrmacht aurait pu débarquer en Angleterre en 1940 ; l’armée rouge gagne la guerre à l’Est à Koursk en 1943 au point que les campagnes ultérieures sont une formalité ; les exemples sont innombrables.

Enfin, afin que nul doute ne subsiste, nous précisons qu’High Flight s’interdit de juger les témoins, ce soin étant laissé au public – si ce dernier le souhaite.

Respect du témoin, du spectateur et qualité audiovisuelle

Nous pensons que le geste qui consiste à témoigner devant une caméra est une démarche psychologiquement coûteuse s’agissant d’événements difficiles comme ceux de la Seconde Guerre mondiale. A cet égard, il nous semble que la décenceexige de celui qui recueille le témoignage qu’il fasse preuve d’une bonne volonté qui fasse écho à celle du témoin. Il ne s’agit pas de recueillir une vulgaire déposition comme dans un commissariat, mais de tendre la main à celui qui, par-delà les générations, nous livre une expérience vécue qui peut être profonde et intense. Le moindre de la décence morale oblige donc à attribuer au témoin toute l’attention qu’il mérite et d’accorder à son témoignage la valeur unique qu’il possède. Autrement dit, il nous paraît indispensable que celui qui recueille le témoignage fournisse l’effort intellectuel et affectif nécessaire pour intérioriser l’expérience qui lui est transmise, sous la forme d’un investissement personnel réel en termes d’écriture audiovisuelle et de qualité technique.

Donner vie au personnage

En premier lieu, une équipe de tournage se doit de mobiliser toutes ses compétences pour donner au témoin toute la présence humaine que lui donne sa valeur de témoin. Ensuite, le témoin doit pouvoir s’exprimer. Les témoignages de quelques minutes qui dominent le paysage multimédia ne sont qu’un aumône concédée à des êtres qui méritent, selon nous, plus de considération eu égard à ce que l’expérience leur a appris des hommes et de l’histoire. Leur donner la possibilité de nous communiquer cette dernière sans limite de durée n’est pas seulement une opportunité pour ceux qui ne savent pas, c’est aussi un minimum de respect envers celui qui sait.

Œuvrer à  un produit fini digne du témoin et du spectateur

En ce début de XXIe siècle, les moyens technologiques les techniques d’écriture cinématographiques, en un mot l’art et la science de l’image, ont atteint un degré de maturité qui impose au moindre document audiovisuel une qualité maximale, même pour un sujet frivole. Dans ce contexte, les sujets peuvent d’autant moins souffrir de la négligence qui, jusqu’ici, a souvent prévalu à la captation des témoignages. Tous les moyens sont disponibles pour éviter la facilité d’une écriture filmique bâclée ou inexistante, d’une image ou d’un son de qualité médiocre, d’une photographie composée avec laisser-aller. High Flight estime que le minimum de décence envers les personnes filmées exige de donner le meilleur de soi-même – dans la limite bien entendu de ses compétences. Dans cet état d’esprit, ils nous paraît naturel d’exiger des membres de l’association la volonté de contribuer à la réalisation – outre des rushes eux-mêmes – de travaux construits, achevés et basés sur un synopsis.

Des images d’archives qui font sens

Dans un paysage audiovisuel dominé par l’image pour elle-même plus que par son sens, les images d’archives accolées aux témoignages sont souvent choisies plus pour leur aspect « esthétique » que pour leur rapport avec le sujet traité. Nous considérons comme malhonnête d’illustrer, par exemple, le témoignage d’un vétéran de la campagne de Tunisie de 1942-1943 avec des images de la campagne de Prusse Orientale de 1944-45 au simple motif qu’elles sont particulièrement racoleuses. A nos yeux, le rôle de ces images n’est pas de « faire joli », mais de donner du relief au propos ; et dans les cas où les images filmées sont inexistantes, le réalisateur américain Ken Burns a largement prouvé qu’il est possible de leur substituer des images fixes et d’en tirer la sève avec une imagination et une créativité artistiques mises au service de l’authenticité. Aujourd’hui, même les logiciels de montage virtuel intègrent l’effet Ken Burns en standard.

L’honnêteté

A nos yeux, puiser dans le vaste et puissant arsenal de la technologie vidéo et des techniques de narration du langage filmique ne signifie pas mettre les techniques de l’image au service de la déformation des faits historiques dans un sens ou dans un autre, mais apporter à l’œuvre filmée les couleurs, les parfums, les sons ou le ressac de l’histoire et des hommes tels que le témoin les vit – ou plutôt les revit – au moment où il nous parle. Ainsi, un vétéran de l’opération BAGRATION(spectaculaire opération militaire lancée à l’été 1944 en Biélorussie par l’armée rouge) méritera d’être filmé non seulement dans sa vénérable datcha aux bois pastel, mais également au cœur de la luxuriance torride des forêts biélorusses en été ; quant aux paroles d’un vétéran de la Résistance italienne, elles résonneront plus profondément sur fond des cieux montagneux, sombres et pluvieux des hivers de la République de Salo. Il faudra savoir capturer non seulement le verbe de l’être humain, mais aussi celui de la cigale en été ou de la pluie en automne, sans oublier ce que l’homme a parfois de plus authentique : le silence.

Avec quels moyens ?

L’association High Flight a d’ores et déjà accès au matériel professionnel qui lui permet dès aujourd’hui de réaliser les premiers tournages et les premiers montages et donc d’ouvrir la voie au type de travaux que nous souhaitons réaliser et susciter chez les futurs membres qui rejoindront l’association HIGH FLIGHT. En effet, l’un des deux fondateurs de l’association, Katia GORSKAÏA, réalisatrice et cadreuse, va mettre au service l’association son équipement articulé autour d’une caméra Canon EOS C100 avec Ninja Blade ainsi que d’une station de montage iMac 27 ‘’ équipée du logiciel de montage FCPX.

Pour résumer en quelques mots, la démarche de High Flight consiste à créer des œuvres vivantes et ayant du sens mais rigoureuses et neutres, en un mot : professionnelles, respectueuses de leur public et donc, in fine, de ceux sans qui notre démarche n’existerait pas : les témoins.

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