Stanislav Alexandrovitch ZVEZDOV

« Tout cela engendrait une forte tension psychologique. Tu ne vois pas ton adversaire, encore que moi, en tant que détecteur, je l’entendais ; mais les autres membres de l’équipage, les mécaniciens, les torpilleurs, les timoniers, ils n’entendent rien et ne voient rien. Ils exécutent les ordres du commandant à la seconde ».

- Stanislav Alexandrovitch Zvezdov

 

 

Stanislav Zvezdov à Paris le 6 mai 2016

  

 

Stanislav Alexandrovitch ZVEZDOV (prononcer Zviézdoff) fait partie des trente-six premiers témoins du projet Normandie Niémen. Enfant et adolescent, il a vécu la montée de l’appréhension qui a précédé l’éclatement de l’opération BARBAROSSA, l’invasion de l’Union soviétique par les nazis en 1941. Quatre années plus tard, en 1945, à l’âge de dix-sept ans, il était détecteur hydro-acoustique à bord d’un sous-marin en opérations de guerre en mer Baltique, au moment des offensives de l’Armée rouge contre la Wehrmacht en Prusse-Orientale et en Pologne. Comme tous les témoignages présentés par High Flight, il est accompagné de ce qui nous a paru être les clés de compréhension qui lui sont nécessaires.

 

 

 

MARDI 30 JANVIER 1945

Un dicton immémorial affirme que les hivers de guerre sont rudes. Le mois de janvier 1945, glacial dans toute l’Europe, semble s’y conformer. En cette soirée du mardi 30 janvier, couverte de neige dans presque tout le pays, la guerre est terminée pour une majorité de Français ; mais son souvenir brûlant couve encore comme la braise sous le froid glacial. C’est l’hiver de l’épuration : deux semaines plus tôt, les héritiers de feu le mythique géant industriel Louis Renault, soixante-sept ans, accusé de collaboration avec les nazis et qui a rendu son dernier souffle à la suite d’un bref séjour derrière les barreaux au cours duquel il aurait fait l’objet de conditions de détentions musclées, ont été dépossédés de leur empire par ordonnance du gouvernement pour « atteinte à la sûreté extérieure de l’Etat ». L’avant-veille, Charles Maurras, soixante-seize ans, figure intellectuelle du demi-siècle et vichyste enflammé, a été condamné à la réclusion à perpétuité pour « haute trahison et intelligence avec l’ennemi ». Depuis dix jours, Robert Brasillach, trente-cinq ans, ex-rédacteur en chef du plus grand organe de presse de la Collaboration, l’hebdomadaire Je suis partout, croupit dans sa cellule à Fresnes pour « intelligence avec l’ennemi », en attente du peloton d’exécution. De Paris, libérée par la 2e division blindée du général Leclerc en août 1944, le général de Gaulle, installé sous les lambris graves et augustes de l’hôtel de Brienne, préside aux destinées de la France [1].

 

La tâche du « Général » et du Gouvernement provisoire de la République Française est herculéenne : éperonner le fonctionnement des institutions républicaines sur tout le territoire ; rétablir l’ordre malgré la pénurie d’agents des forces de l’ordre ; rebâtir la souveraineté d’un pays qui émerge de quatre années d’Occupation allemande, libéré par des forces armées extérieures dont la colonne vertébrale est américaine et dépend de Washington, une capitale qui rugit dès qu’il est question d’indépendance du pays ; et par des forces intérieures dont le muscle le plus fort est un parti communiste qui voue un culte au chef de l’Etat soviétique ; redémarrer une économie disloquée par quatre années de prédation nazie, par des milliers de bombardements aériens alliés et par les destructions sur les champs de bataille.

 

En attendant, pour une écrasante majorité de Français, le quotidien, c’est le froid mordant et les tickets de rationnement. Pour les autres, pour les cent cinquante mille Français qui peuplent encore les villes portuaires de Royan, La Rochelle, Dunkerque, Lorient, Saint-Nazaire ; qui peuplent la région de Colmar et le nord de l’Alsace, le quotidien n’a pas changé depuis 1940 et c’est l’occupation nazie. En cette soirée du 30 janvier, alors que tous les poêles sont allumés et que tournent les aiguilles des horloges, que les enfants dorment déjà et que l’heure de les imiter approche pour les plus âgés, l’Europe reste en proie au chemin de croix de la guerre. Pour quatorze millions d’hommes et de femmes – neuf millions à l’Est, cinq à l’Ouest – qui combattent sur trois mille cinq cents kilomètres de front – deux mille cinq cents à l’Est et mille à l’Ouest – dans quatorze pays d’Europe, la peur, le sang et la mort se conjuguent toujours, heure par heure, au présent de l’indicatif.

 

 

LE WILHELM GUSTLOFF

 

A sept cents kilomètres de Paris, sous une violente tempête de neige, un sous-marin soviétique fend les embruns noirs et hostiles de la mer Baltique. A 21h08 heure de Paris, il ouvre le feu avec trois torpilles contre un navire de transport militaire allemand du gabarit du Titanic. En soixante-dix minutes, le géant des mers engloutit avec lui la plus grande partie des mille six cents militaires des forces armées du IIIe Reich – dont près de mille sous-mariniers – qu’il avait ordre de convoyer vers la plus grande base militaire navale allemande, celle de Kiel. Le navire allemand qui vient d’être détruit n’est pas n’importe quel navire : il devait à l’origine s’appeler le Adolf Hitler avant d’être, tout compte fait, baptisé Wilhelm Gustloff, du nom du martyr de la cause nazie en Suisse assassiné par un étudiant juif en 1936.

 

Pour la marine de guerre allemande, la perte, au cours d’un unique combat naval, de vingt-cinq mille tonnes de capacité de transport et des équipages de dix à quinze sous-marins, est une perte réelle. La propagande soviétique hissera ce succès, bien palpable au demeurant, au rang d’« attaque du siècle ». Inversement, les médias des pays de la future OTAN n’y verront que les civils allemands présents à bord du Wilhelm Gustloff et qui fuyaient l’offensive soviétique contre la Wehrmacht en Prusse-Orientale. Ajoutant leur nombre à celui des militaires embarqués par le Wilhelm Gustloff, ils ont conféré au combat naval un superlatif supplémentaire, celui de plus grand naufrage de l’histoire de la navigation. La palette de superlatifs de cet affrontement provoquera, dans les décennies ultérieures, une débauche d’encre et de pellicule de cinéma. Au total, rien que depuis 2000, trois films et deux livres lui ont été consacrés en Allemagne, en Russie et aux Etats-Unis.

 

 

STANISLAV ALEXANDROVITCH ZVEDZDOV

 

Le sous-marin s’appelle le S-13. Sur les quelque deux cents submersibles soviétiques qui auront opéré pendant la Seconde Guerre Mondiale, il terminera au tout premier rang du tonnage ennemi envoyé par le fond. Neuf jours après son succès du 30 janvier 1945, le S-13 coulera un second navire de transport géant de la Kriegsmarine, le Steuben, cette fois sans même se faire repérer par l’escorte. Au cours de leur patrouille d’un mois, les quarante-cinq hommes d’équipage du S-13 auront, à eux seuls, coûté à Hitler 40.000 tonnes de capacité de transport et quatre mille soldats. Ces chiffres apporteront au commandant du sous-marin, le capitaine de corvette Alexandre Ivanovitch Marinesko, le surnom de « sous-marinier numéro Un ». Parmi ses quarante-cinq hommes d’équipage se trouve un garçon qui, le 30 janvier, est à quatre semaines de son dix-septième anniversaire. Il est opérateur de détection hydro-acoustique, il s’appelle Stanislav Alexandrovitch Zvezdov. Nous l’avons rencontré en mai 2016, nous l’avons filmé et il est le premier témoin du projet Normandie Niémen de l’association High Flight.

 

Le jour de l’entretien, Stanislav Alexandrovitch avait 88 ans. Né à Moscou quatre ans après la mort de Lénine, à l’heure où la montée au pouvoir de son successeur, Staline, était encore fraîche, il fait partie des enfants de ceux qui ont connu la révolution d’octobre 1917. A l’éclatement de la Seconde Guerre mondiale, il a onze ans. Lorsque cent soixante divisions de l’Axe déclenchent contre son pays l’invasion la plus meurtrière de l’histoire de l’humanité, il en a treize [2]. L’été de l’éclatement de la « Grande Guerre patriotique », comme l’appellent les Russes, est un temps où les enfants et les adolescents ne le restent pas longtemps : les nuits caniculaires de vacances scolaires du jeune collégien sont hachées par les hurlements des sirènes d’alerte anti-aérienne déclenchées par le grondement des bombardiers de la Luftwaffe au-dessus de la capitale soviétique ; après la rentrée scolaire, lorsque les rues de Moscou sont battues par une soudaine pluie glaciale, il vit les heures d’épouvante qui engloutissent la capitale lorsque, le 16 octobre [3], les panzers approchent, que le plus grand quotidien de l’Armée rouge, Krasnaïa Zviézda (« L’étoile rouge »), titre  « La menace plane sur Moscou et notre pays », et que le chaos des fuyards et des pillards le dispute au mouvement des civils qui, gravement, s’enrôlent en masse pour donner leur vie à seulement quatre-vingt-dix kilomètres à l’ouest de la ville, dans le fol et ultime espoir d’inverser le cours de l’histoire. Deux années et demie plus tard, à l’âge où nos potaches font leurs premiers pas au lycée, Stanislav Alexandrovitch, qui vient de souffler ses seize bougies, devance l’appel, comme des millions de compatriotes de sa génération, et signe son engagement dans l’Armée rouge. A la rentrée scolaire, il ne sera pas à son pupitre : il combattra à bord d’un sous-marin en mission de guerre contre la marine d’Hitler.

 

 

LE S-13

 

Le 11 janvier 1945, Stanislav Zvezdov est à bord du S-13 lorsque ce dernier reprend la mer pour sa cinquième patrouille de guerre. Comme son nom l’indique, le sous-marin est un bâtiment de la classe S. Cette classe de sous-marins aura compté dans ses rangs une grosse centaine de submersibles qui correspondent, grosso modo, au Typ VII allemand, la bête de somme de la Kriegsmarine, mais en un petit peu plus gros et en un petit peu plus rapide. Le S-13 a ceci de particulier que parmi les treize sous-marins de sa classe alignés par la flotte de la Baltique depuis le début de la guerre, il est le dernier survivant, le treizième [4].

 

 

 

Ce sous-marin n’est pas le S-13 mais un sistership identique, le S-56 de la flotte du Pacifique, exposé à Vladivostok. Un sous-marin de la classe S déplace 850 tonnes pour une longueur de 80 mètres. Il emporte entre quarante-cinq et cinquante hommes d’équipage.

 

 

De surcroît, des treize sous-marins de sa classe, le S-13 est, en ce jeudi 11 janvier 1945, second en palmarès de tonnage allemand coulé avec le total, relativement modeste pour un sous-marin il est vrai, de quatre mille tonnes. Il est derrière le S-7 qui avait dépassé les neuf mille tonnes avant d’être coulé en 1942, emportant avec lui dans les abysses quarante-six de ses hommes d’équipage.

 

 

 

Alexandre Marinesko, commandant du S-13.

 

[Texte relatif à Marinesko en cours de rédaction]

 

 

L’EUROPE LE 11 JANVIER 1945

 

Le jour où le S-13 lève l’ancre, toutes les provinces françaises sont entièrement libérées du nazisme à l’exception de la Bretagne, de l’Aunis-Saintonge et de la Flandre, où les villes portuaires de Lorient, Saint-Nazaire, Royan, La Rochelle et Dunkerque sont toujours occupées ; mais à l’exception, surtout, de l’Alsace où les forces américaines et françaises sont confrontées, côte à côte, à une offensive de la Wehrmacht. A en croire nos manuels scolaires, la Seconde Guerre Mondiale en Europe est alors virtuellement terminée puisque « le 6 juin 1944, les Alliés débarquent en Normandie ; le 25 août, Paris est libéré et le 8 mai 1945, l’Allemagne capitule ».

 

La réalité des faits n’est pas aussi caricaturale. A l’heure où le S-13 sort du port de Hanko [5], en Finlande, pour une nouvelle mission de guerre, l’empire nazi s’étend, du sud au nord, sur près de trois mille kilomètres, des confins des Apennins italiens aux glaces de l’océan Arctique ; cependant, d’ouest en est, il est beaucoup plus effilé : huit cents kilomètres seulement séparent l’extrême pointe occidentale de la 6e armée blindée de la Garde soviétique, au nord-ouest de Budapest, en Hongrie, de l’extrême pointe orientale de la 1ère armée américaine en Alsace. Au total, la Lotharingie géante qu’est alors l’Europe d’Hitler s’étend encore sur plus d’un million et demi de kilomètres carrés sur les territoires de treize pays de l’Europe d’alors (quinze de l’Europe actuelle) et ses portes sont défendues par l’armée la plus expérimentée au monde. Le front de l’Ouest serpente sur mille kilomètres des Pays-Bas à la frontière suisse, et les forces américaines, britanniques, canadiennes, françaises et polonaises y affrontent plus de soixante-dix divisions nazies. A l’Est, c’est sur deux mille trois cents kilomètres que le front s’étire, de la mer Baltique à la mer Adriatique. L’Armée rouge y fait face à près de deux cents divisions de l’Axe qui ne manquent pas de confiance en leurs capacités. A l’Est comme à l’Ouest, les frontières de l’Allemagne nazie sont atteintes.

 

 

 

Les lignes de front au 11 janvier (à l’exception du front qui oppose la Wehrmacht et l’Armée rouge en Norvège). Pour votre confort de lecture, nous vous suggérons de cliquer sur cette carte pour l’ouvrir dans un nouvel onglet de votre navigateur.

 

 

C’est dans ce décor aux dimensions continentales que commence la mission de guerre de notre témoin, Stanislav Alexandrovitch Zvezdov. En déchiffrer le sens invite à comprendre la situation qui prévaut alors.

 

 

DU NOUVEAU A L'OUEST

 

A l’Ouest, les forces alliées – essentiellement les américaines et les françaises – sont sur la brèche. Au mois de décembre, la Wehrmacht y a asséné coup sur coup deux offensives à deux semaines d’écart.

 

La première a surgi dans les Ardennes belges. C’est l’opération WACHT AM RHEIN (« Garde du Rhin »), au sud de la percée américaine d’Aix-la-Chapelle. En une semaine de combats dans d’impénétrables forêts de pins enneigées et nimbées de brouillard, les panzers ont renversé les défenses américaines sur cent kilomètres de large et autant de profondeur. Cependant, l’opération, pensée par Hitler lui-même, n’était pas conçue à la hauteur de ses moyens matériels et les Américains sont passés à la contre-offensive.

 

La seconde offensive allemande, c’est l’opération NORDWIND, (« Vent du nord »). Elle a éclaté deux cents kilomètres plus au sud-est, en Alsace, le jour de la Saint-Sylvestre. En ce 11 janvier, ce sont deux armées allemandes qui approchent de Strasbourg. La capitale de l’Alsace, libérée en novembre 1944, est menacée au point qu’une semaine plus tôt, le commandant en chef des forces alliées en Europe, le général américain Dwight Eisenhower a donné l’ordre de l’évacuer.

 

Pour le premier ministre britannique Winston Churchill, ces deux chocs portent un « coup très rude » aux Alliés. Eisenhower et lui-même ont donc appelé à l’aide le chef de l’état soviétique, Josef Staline, en lui câblant le 6 janvier: « La bataille à l’Ouest est très pénible […]. Vous-même connaissez d’expérience l’angoisse de devoir défendre un large front après la perte temporaire de l’initiative. Le général Eisenhower a absolument besoin de connaître vos intentions car elles impacteront toutes nos décisions majeures. […] Je vous serais reconnaissant si vous vouliez bien me dire si nous pouvons compter sur une offensive russe majeure sur le front de la Vistule ou ailleurs […] Signé : Winston Churchill, 6 janvier 1945 ».

 

 

L'EST, LE FRONT GEANT

 

Or, justement, à l’Est, que se passe-t-il ? Le front s’y étend sur plus de deux mille kilomètres de la mer Baltique à la mer Adriatique. L’Armée rouge y fait face à près de deux cents divisions de l’Axe. En 1944, à l’occasion des célébrations du 1er mai et alors que l’Armée rouge n’avait pas encore chassé l’occupant du territoire national, Staline a rédigé un ordre du jour : « […] dorénavant, notre objectif est de libérer des envahisseurs fascistes l’ensemble de notre territoire […mais…] notre tâche ne peut se réduire à expulser les troupes ennemies de notre pays […]. Une bête blessée qui se retire dans sa tanière ne cesse pas d’être une bête dangereuse […]. Nous devons suivre la trace de la bête allemande blessée et l’achever dans sa propre tanière […]. A l’évidence, cette tâche est plus difficile que d’expulser les troupes allemandes de notre pays ».

 

Depuis, l’Armée rouge a intégralement repoussé d’Union Soviétique les armées d’Hitler et de ses alliés, qui ont laissé derrière elles le paysage le plus terrifiant qu’ait connu l’histoire de l’humanité : mille sept cents villes et agglomérations partiellement ou totalement détruites et incendiées, soixante-dix mille villages et hameaux ; vingt-cinq millions de sans-abri et entre treize et seize millions de civils tués, hommes, femmes et enfants. Le point d’orgue de la libération a été l’opération BAGRATION qui a expulsé les nazis de Biélorussie à l’été 1944, pulvérisant un groupe d’armées allemand jusqu’à la Vistule, où elle a établi trois têtes de pont sur la rive ouest, et jusqu’à la frontière de la Prusse-Orientale, en infligeant à l’Allemagne, dans une chaleur caniculaire, la défaite la plus spectaculaire de toute son histoire militaire. Seule l’intervention du Maréchal Walter Model, l’un des meilleurs généraux nazis de la Seconde Guerre Mondiale, a réussi in extremis à rétablir un front sur la Vistule, en Pologne.

 

A l’automne, c’est au nord et au sud du front Centre que l’Armée rouge a fait reculer la Wehrmacht. Au nord, dans les pays Baltes, elle est parvenue à atteindre la mer Baltique, isolant en Lettonie le groupe d’armées Nord allemand, naguère fier assiégeant de Leningrad au cours d’un siège qui avait tué un million de civils. Au sud, l’Armée rouge a abattu coup sur coup deux alliés d’Hitler. D’abord la Roumanie, troisième puissance militaire de l’Axe et plus puissant allié de l’Allemagne nazie à l’Est, ayant organisé sa propre Shoah sur le territoire soviétique, y tuant trois cent mille Juifs ; ensuite la Bulgarie, faisant planer sur la Wehrmacht dans le sud des Balkans une menace d’isolement qui a poussé cette dernière à se replier vers le nord de la Yougoslavie et donc à évacuer la Grèce […], l’Albanie et toute la moitié sud de la Yougoslavie. Enfin, l’Armée rouge a franchi les Carpates et débouché dans les plaines de Hongrie, l’ultime et plus fidèle allié de l’Allemagne au cours des deux Guerres Mondiales.

 

Où en sommes-nous en ce 11 janvier 1945 ? A la différence de l’Ouest, où les forces alliées sont, pour l’heure, sur la défensive stratégique, l’Armée rouge, à l’Est, s’est attelée, dès l’automne 1944, à la planification de ses prochaines opérations de grande envergure. Il en est ressorti le principe de deux nouvelles opérations majeures dont l’ambition est rien moins que de pénétrer à l’intérieur même du territoire allemand [6]. La première, VISTULE-ODER, doit s’élancer à partir des têtes de pont établies pendant l’été 1944 sur la rive occidentale de la Vistule, avec pour objectif de repousser la Wehrmacht à travers la Pologne jusqu’à l’intérieur même des frontières de l’Allemagne, sur le fleuve Oder, dans les régions du Brandebourg et de Silésie. La seconde, PRUSSE-ORIENTALE, doit repousser, voire détruire les forces nazies en Prusse-Orientale. Compte tenu du colossal effort logistique préalable qu’elles exigent, ces deux opérations principales sont prévues pour ne pas démarrer avant la seconde quinzaine de janvier 1945.

 

C’est dans ce contexte qu’arrive à Moscou le câble du premier ministre britannique et du commandant en chef des forces alliées en Europe. Ses auteurs ne vont pas être déçus. Pas plus tard que le surlendemain, la Stavka [7], après avoir examiné la demandé alliée, estime possible de précipiter les ultimes préparatifs de ses prochaines grandes offensives et ordonne d’inaugurer le déclenchement de celles-ci quatre jours plus tard. Au résultat, six jours seulement après l’appel allié du 6 janvier, et en l’espace de soixante-douze heures, l’Armée rouge va lancer successivement contre la Wehrmacht trois offensives dont deux d’envergure majeure, en avance par rapport au calendrier.

 

 

SOUS-MARINS RUSSES

 

C’est donc en plein cœur du branle-bas de combat des chocs qui s’apprêtent à éclater en Prusse-Orientale et en Pologne que les sous-marins soviétiques de la flotte de la Baltique appareillent de leurs bases avancées installées sur les côtes finlandaises depuis l’armistice de l’automne précédent entre les deux pays. Les zones d’opérations que les submersibles ont pour objectifs sont celles où ils ont le plus de chances de repérer du gros gibier, à savoir des convois militaires maritimes allemands à destination des secteurs géographiques que l’ennemi devrait, logiquement, chercher à ravitailler par la mer, ou à partir desquels, inversement, il pourrait vouloir rapatrier des effectifs pour renforcer son front principal ; par exemple à partir de la poche de Courlande, en Lettonie. Le groupe d’armées Nord allemand y est toujours retranché, isolé du front principal du groupe d’armées Centre depuis l’automne 1944 à la suite du succès de l’offensive du Maréchal Ivan Bagramian et du général Ivan Tcherniakhovski en direction de la mer Baltique.

 

Un à un, les sous-marins de la flotte de la Baltique qui se trouvaient à quai se glissent hors de leur port à destination de leur zone de combat. A cette époque de l’année, le jour, grisâtre, n’apparaît que vers huit heures du matin et, à quatre heures de l’après-midi, la nuit tombe déjà sur des rivages gelés bordant une mer dangereuse, encombrée par les glaces, infestée de champs de mines et balayée de tempêtes de neige. Parmi ces sous-marins, le S-13 ; à son bord, Stanislav Alexandrovitch Zvezdov, qui ignore que la mission qu’il entreprend ce jour-là va faire du S-13 le plus célèbre sous-marin soviétique de la Seconde Guerre Mondiale.

 

 

 

La côte de la mer Baltique gelée en hiver

 

VOYAGE EN SILENCE VERS L'ORAGE

 

Opération VISTULE-ODER

 

Le lendemain 12 janvier avant le lever du jour, tandis que le S-13 fend les eaux noires du cœur de la Baltique, cap au sud vers la côte du Reich, la déflagration des offensives soviétiques retentit sur le continent. A quatre heures quarante-cinq du matin, dans le sud-est de la Pologne, la nuit glaciale, plongée dans un épais brouillard, est soudain fendue d’un long halo lumineux qui s’étale sur tout l’horizon. Sur une longueur de cent kilomètres, l’artillerie lourde du Premier Front d’Ukraine [8] du Maréchal Ivan Koniev vient d’entrer en action sur le front de la Vistule. L’opération VISTULE-ODER commence. Son objectif stratégique est d’atteindre la « tanière » hitlérienne puis de s’y enfoncer en profondeur, ce qu’aucun belligérant n’a encore jamais fait.

 

Aux premières heures de l’après-midi, dans la première ligne de défense allemande, il ne reste plus un Allemand vivant, et la seconde ligne ne tient plus que par endroits. En une dizaine d’heures, ce sont pas moins d’un million de soldats et trois mille blindés du Premier Front d’Ukraine qui passent à l’offensive sur la rive occidentale de la Vistule. Lorsque la nuit retombe, les chars de Koniev sont déjà vingt kilomètres derrière les décombres des lignes ennemies. En une journée, l’un des corps d’armée allemands a cessé d’exister.

 

 

Opération PRUSSE-ORIENTALE

 

Le lendemain 13 janvier, alors que le S-13 approche de son secteur d’opérations, les eaux du nord du golfe de Dantzig [9], c’est cette fois bien plus au nord, à la frontière de la Prusse-Orientale, qu’un autre groupe d’armées soviétique, le 3e Front de Biélorussie du général Ivan Tcherniakhovski, inaugure l’autre opération de très grande envergure de la Stavka, l’opération PRUSSE-ORIENTALE. L’ennemi est cette fois le général Georg-Hans Reinhardt, tacticien virtuose et nazi impitoyable au nerfs d’acier. Ses solides défense s’étirent, du nord au sud, de la mer Baltique jusqu’au nord de Varsovie, longeant grosso modo la frontière est de la Prusse-Orientale puis s’enfonçant vers le sud, à travers le nord-est de la Pologne.  Le premier objectif du groupe d’armées de Tcherniakhovski, de l’autre côté de la frontière prussienne, est l’emblème du militarisme allemand, la cité-forteresse de Königsberg [10]. En ce 13 janvier, les frontoviks [11] qui s’élancent contre la Prusse l’ignorent probablement, mais ces confins de l’Allemagne dans lesquels ils vont s’enfoncer sont menés par un connaisseur de leur pays. Son nom : Erich Koch, Gauleiter de Prusse-Orientale [12].

 

A l’âge de quarante-huit ans, Erich Koch, l’un des plus vieux fidèles d’Hitler, est un tueur brutal, sans pitié. Ancien Reichskommissar der Ukraine (Commissaire du Reich en Ukraine), il y a appliqué d’une main de fer les directives allemandes pour les territoires conquis à l’Est, décidant la mort pure et simple d’une partie de la population par la déportation vers les camps de concentration – vers les ghettos pour les Juifs – ainsi qu’en décrétant la famine organisée. A ces actions radicales qui restent pourtant dans la norme nazie pour l’Europe de l’Est, Erich Koch a ajouté sa touche personnelle : une optimisation de la mortalité au moyen de l’abaissement planifié du niveau d’hygiène. Erich Koch a résumé : « Si je rencontrais un seul Ukrainien digne de s’asseoir à ma table, je le ferais exécuter » car « nous sommes une race de maîtres qui doit se souvenir que le moindre ouvrier allemand est racialement et biologiquement des milliers de fois supérieur à la population autochtone ». Tel est l’homme qui, ce 13 janvier 1945, dirige la Prusse-Orientale depuis Königsberg, à l’heure où les soldats soviétiques tambourinent au portail de son Gau.

 

A l’attention du lecteur français, signalons que face au Gau d’Erich Koch, dans les rangs des frontoviks qui entreprennent l’opération PRUSSE-ORIENTALE se trouvent… des Français. En effet, le groupe d’armées d’Ivan Tcherniakhovksi englobe l’armée aérienne au sein de laquelle opère un groupe de pilotes de chasse français libres, le Normandie-Niémen, qui combat les nazis sur le front de l’Est depuis 1943.  La contribution de ces pilotes aux batailles à l’Est est certes symbolique, mais elle est bienvenue pour une aviation soviétique qui, par exemple, doit affronter les quatre cinquièmes de toute l’aviation d’assaut allemande.

 

Ce 13 janvier, l’artillerie de Tcherniakhovski déclenche un tremblement de terre assourdissant contre les défenses allemandes de Prusse-Orientale tandis que fantassins et chars passent à l’attaque dans un vent humide et glacial. Les Allemands résistent avec fureur, les pertes soviétiques sont lourdes. Le front tient. La campagne de Prusse-Orientale commence et elle va devenir l’une des batailles les plus terribles qu’ait connues l’Armée rouge, tout particulièrement le purgatoire du front oriental de Tcherniakhovski.

 

 

LE S-13 A L’AFFÛT

 

Pendant qu’éclatait ce deuxième coup de tonnerre, le S-13, au bout de deux jours de voyage et six cents kilomètres de mer, est parvenu dans son secteur de patrouille au large des côtes de Prusse-Occidentale et y a pris position dans l’obscurité. Le sous-marin se situe alors, à vol d’oiseau, à trois cents kilomètres à l’ouest de la ligne de front où, sur la terre ferme, Tcherniakhovski a engagé l’assaut frontal aux confins orientaux de la Prusse.

 

 

 

Le « carré » - la cantine – d’un sous-marin de la classe S.

 

 

Le lendemain 14 janvier, tandis qu’en mer, le S-13 inaugure en silence sa première journée à l’affût, sur la terre ferme, l’envergure des opérations de l’Armée rouge monte encore d’un cran. Sur la Vistule, le Maréchal Guéorgui Joukov ouvre le second volet du diptyque VISTULE-ODER. Sur un front de cent kilomètres de large, le plus célèbre général de l’Armée rouge passe à l’attaque au moyen de la moitié de l’infanterie de tout son 1er Front de Biélorussie et des trois quarts de ses trois mille chars et dix mille pièces d’artillerie – une pièce tous les quelques mètres. Quelques minutes avant neuf heures, le brouillard épais est soudain cisaillé par les éclairs des départs des sept mille pièces d’artillerie du vainqueur de Moscou de 1941, au rythme de trois cents obus lourds par seconde qui vont labourer les défenses nazies. Lorsque l’infanterie soviétique, soutenue par les chars, s’élance contre la première ligne ennemie, cette dernière a déjà cessé d’exister en tant que telle. A dix heures du matin, elle est entre les mains des frontoviks. Pourtant, dans l’esprit de Joukov, la bagarre n’a pas encore commencé : il déchaîne à nouveau le feu de son artillerie, deux fois plus longtemps ; puis il donne le signal de sa véritable offensive et lâche trois armées qui avancent derrière un barrage de feu roulant. Peu après midi, ses soldats ont déjà réduit plusieurs divisions allemandes à l’état de simples symboles sur les cartes d’état-major. Les unités blindées qu’il tenait en réserve surgissent alors pour traverser les positions de l’infanterie et foncer, seules, vers l’ouest, sur les arrières du front allemand, en direction de leurs premiers objectifs situés jusqu’à cinquante kilomètres de distance. Au crépuscule, en fin d’après-midi, les pointes blindées soviétiques ont déjà parcouru vingt kilomètres. Avec l’offensive de Joukov, VISTULE-ODER atteint à elle seule la puissance de toutes les armées terrestres alliées sur le front de l’Ouest.

 

Pour la Stavka, cette journée du 14 janvier n’est pas terminée. Le jour même où Joukov passe spectaculairement à l’offensive pour parachever le lancement de l’opération VISTULE-ODER, son voisin septentrional, le 2e Front de Biélorussie du Maréchal Constantin Rokossovski, se met lui aussi en mouvement. Face à lui, le général Reinhardt lance ses panzers dans de sanglantes contre-attaques, et si les forces nazies lâchent un peu de terrain, elles ne lâchent pas prise.

 

Malgré les difficultés en Prusse-Orientale, Joukov et Rokossovski viennent de placer, avec les deux nouvelles offensives de la journée, les deux dernières briques de l’architecture offensive de la Stavka.

 

Ce 14 janvier, alors que la nuit est tombée sur la Baltique, le jeune Stanislav Alexandrovitch attend déjà depuis deux jours et deux nuits, à bord du S-13, que le remue-ménage sur le sol du continent anime les navires ennemis [13].

 

 

Double choc de blindés la même journée

 

Le 15 janvier, Joukov a déjà lancé deux armées blindées au travers des trous béants qu’il a forés la veille dans le front allemand à l’ouest de la Vistule. Les masses blindées allemandes et soviétiques se percutent littéralement. Les divisions de panzers alignent des chars de quarante-cinq tonnes, les armées blindées de la Garde soviétique aussi. La mêlée est brutale,  le coup de griffe farouche des panzers subit un coup d’arrêt. Joukov éperonne immédiatement ses blindés qui reprennent leur folle chevauchée. Leurs objectifs : encercler Varsovie, avant-guerre capitale de la Pologne, aujourd’hui épicentre du dispositif nazi à l’Est ; mais également tendre la main, beaucoup plus loin, vers la ville industrielle de Lodz (prononcer Ouodj), éloignée de… cent trente kilomètres. Au soir, l’une des armées du Premier Front de Biélorussie en a englouti quatre-vingts.

 

A la main gauche de Joukov, chez Koniev, les deux armées blindées que ce dernier avait propulsées à travers la percée ont déboulé en plein dans la réserve de panzers ennemie, complètement surprise. Déferlant entre les chars allemands, les blindés soviétiques ont ouvert le feu à bout portant sans leur laisser le temps de respirer. Puis, s’étant à peine arrêtées, les deux meutes sur roues ont repris leur charge terrible vers l’ouest. Soixante-dix kilomètres ne les séparent plus que de Cracovie, la Babel du Gouvernement général de Pologne.

 

 

Le regard d’Hitler se tourne à l’Est

 

Comme une onde de choc, les nouvelles atteignent Berlin : la réserve blindée qui faisait face à Joukov a fondu et celle qui faisait face à Koniev ne donne pas de nouvelles. Hitler, tendu comme un arc, riposte. D’un trait de plume, il démet de ses fonctions le commandant de tout un groupe d’armées. Plus significativement, il décide de prendre sur le front de l’Ouest, et sur d’autres, les divisions nécessaires au rétablissement de la situation à l’Est. Enfin, il ordonne que les chars neufs qui sortiront des usines soient canalisés en direction des unités qui font face à l’Armée rouge. Ces décisions sont précisément celles que Churchill et Eisenhower appelaient de leurs prières. En trois journées de combats, les frontoviks de Koniev et de Joukov viennent ainsi de signer l’accusé de réception au courrier reçu par Moscou le 6 janvier.

 

Le 16 janvier, tandis qu’en Pologne, les chars de Koniev et de Joukov poursuivent leurs chevauchées d’acier, la Prusse, elle, continue d’opposer une résistance farouche. Il faut aux frontoviks des sacrifices surhumains pour arracher quelques kilomètres de forêt à une Wehrmacht qui s’accroche à chaque mètre, surgissant pour ouvrir le feu à bout portant au lance-grenade antichar contre les blindés de Tcherniakhovski. Néanmoins, au bout de quatre jours de carnage, les soldats du général juif prennent une première petite ville prussienne. Plus au sud-ouest, Rokossovski, en proie à de violentes contre-attaques de panzers, n’arrive pas non plus à percer. Tout au plus a-t-il pu faire reculer un peu la Wehrmacht. Il prend alors la décision de faire entrer en lice prématurément l’armée blindée qu’il conservait précieusement en attendant une percée.

 

 

Chevauchée dans la neige

 

Le 17 janvier, les deux armées allemandes qui faisaient face à Koniev et à Joukov sur la Vistule ont été cisaillées en morceaux. Emiettées, elles ont cessé d’exister en tant que telles. Leurs débris errent dans la plaine, se cherchant les uns les autres pour s’amalgamer et tâtonner en direction de l’ouest, entre les colonnes de chars soviétiques, à la recherche d’un front dont elles ignorent où il se trouve et s’il existe encore. Les blindés des deux Maréchaux soviétiques ne s’arrêtent même pas pour les intercepter. Ils roulent vers l’ouest, encerclant des villes polonaises à cent trente kilomètres de leurs lignes de départ tout en fonçant déjà vers les suivantes. Ils sont à seulement trente kilomètres de la frontière silésienne.

 

Quelques kilomètres à l’ouest commence le territoire d’une région de Pologne que les nazis ont mise sur pied en 1939 : le Wartheland.  Ces derniers y ont pratiqué l’extermination progressive des habitants polonais afin que des colons allemands puissent venir prendre leur place. Pour ces derniers, venus s’installer en nombre, les progrès fulgurants de l’Armée rouge sont une calamité. Dans une ambiance de fin du monde, ils plient leurs valises pour disparaître vers l’ouest avant que les Russes n’arrivent. Une petite centaine de kilomètres plus au sud, à cinquante kilomètres de distance des soldats de Koniev les plus avancés, dans le sud de la Pologne, le camp principal du complexe d’Auschwitz est lui aussi frappé d’agitation. Les SS rassemblent en désordre tous les déportés qu’ils ont pu trouver dans les dizaines de camps satellites, soit plusieurs dizaines de milliers de personnes. Longtemps après la tombée de la nuit, dans le froid glacial, ces derniers sont emmenés dans l’obscurité, en longues colonnes, dans une marche de la mort vers l’ouest. Avant le départ, les SS coupent le chauffage, ne laissant derrière eux que la lumière électrique pour les derniers miradors qui gardent encore les six cents derniers déportés trop malades pour marcher.

 

La même nuit, un autre camp vit ses derniers soubresauts : celui de Chelmno, le seul camp d’extermination du Wartheland. Bien qu’il soit encore éloigné de deux cents kilomètres du front, les nazis sont déjà en tain de le détruire. Enfin, toujours au cours de cette même nuit, au bord de la Vistule, c’est Varsovie elle-même qui bruisse. La ville n’est plus qu’un immense champ de ruines depuis les deux mois qu’a duré son insurrection de 1944. Dans les ténèbres, ses derniers soldats allemands fuient discrètement ses décombres pour échapper à l’encerclement mené par deux armées de Joukov.

 

Aux premières lueurs du 18 janvier, à trente kilomètres au nord de la côte prussienne, sous une aube pâle qui succède à cette nuit chargée d’histoire, le S-13 entame son cinquième jour d’attente de ce que cette dernière lui réserve.

 

 

Une porte de la Prusse-Orientale grince sur ses gonds…

 

18 janvier, Prusse-Orientale. Cela fait cinq jours que les frontoviks de Tcherniakhovski se sont engouffrés en enfer. Chaque jour en moyenne, un millier d’entre eux est tué et quatre mille autres sont blessés. Le général soviétique, qui ne parvient toujours pas à emporter les lignes ennemies et qui voit ses soldats se sacrifier dans des combats inhumains, se résout à jouer le tout pour le tout et mise une armée et l’un des corps blindés de sa réserve. C’est la goutte d’eau qui va faire déborder le vase. Les Allemands accusent le choc, lâchent prise, reculent, mais en bon ordre. Tcherniakhovski s’empare d’un gros village. C’est maigre, mais il sent que le « fasciste » commence à transpirer et à serrer les dents.

 

 

… l’autre vole en éclats

C’est plus au sud-ouest que l’armée rouge va jouer le coup qui va faire basculer la situation. A une soixantaine de kilomètres au sud de la frontière prussienne, Constantin Rokossovski n’avait jusqu’ici réussi qu’à repousser de quelques kilomètres un front allemand solide comme un roc. Le Maréchal soviétique a alors fait le pari de lancer sa réserve blindée. Elle est parvenue à creuser sa route au travers de l’ennemi au point de déchirer en deux l’armée qu’elle avait en face d’elle. Au sud de la Prusse, le front allemand est percé. Mieux : les pointes de Rokossovski s’enfoncent désormais vers le nord-ouest.

 

A la nuit tombée, à l’autre bout de la Pologne, à quarante-cinq kilomètres à l’ouest des éléments les plus avancés de Koniev, le camp d’Auschwitz, frigorifié par moins vingt degrés depuis que le chauffage y est coupé, grince encore : les derniers SS s’en vont. Cette fois, ils éteignent la lumière derrière eux avant de s’éclipser. Dans la même nuit, cent kilomètres plus au nord-ouest, les avant-gardes du Maréchal Ivan Koniev, fantômes dont les moteurs grondent sous le scintillement froid de la lune qui se réverbère sur la neige, atteignent la frontière orientale de la Silésie. Après la Prusse, la Silésie est la seconde province d’Allemagne nazie atteinte par l’Armée rouge. Toujours au même moment, Chelmno, qui n’est maintenant plus qu’à cent cinquante kilomètres à l’ouest des éléments de tête du Deuxième Front de Biélorussie, résonne de claquements secs : les SS tuent un à un, à coup de pistolet, tous les Juifs. Le calme revenu, ils brûlent les documents du camp. Au petit matin du 19, ils s’en vont, laissant retomber le silence sur ce qui fut l’unique camp d’extermination du Wartheland.

 

Dans la matinée du 19, les chars de Rokossovski franchissent la frontière sud de la Prusse.

 

Trente-six heures seulement après avoir expulsé les nazis de Varsovie, les unités de Joukov entrent cette fois dans Lodz, cent vingt kilomètres plus à l’ouest. L’agglomération industrielle est la première grande ville du Wartheland à être abandonnée par les Allemands.

 

 

L’antre de Hans Frank

 

Ce 19, Koniev, de son côté, atteint Cracovie, capitale du Gouvernement général. La ville abrite le château de l’un des maîtres tueurs du Reich, le tortueux gouverneur Hans Frank. Architecte du ghetto de Varsovie, il a envoyé des millions d’êtres humains mourir dans les camps de travail ou d’extermination de sa toute-puissante satrapie. Deux jours avant que les soldats de Koniev n’atteignent Cracovie, il a abandonné son palais pour un autre, plus à l’ouest, en Silésie.

 

Hitler, depuis sa monumentale chancellerie, braque ses yeux sur la menace que le mouvement de Rokossovski fait peser sur la Prusse-Orientale. En effet, les terres d’Erich Koch sont le verrou stratégique de la mer Baltique, dernier espace maritime où les sous-marins, unique arme stratégique qui reste au Reich, peuvent former et entraîner leurs équipages. Les deux cents kilomètres de côte prussienne abritent cinq de leurs bases, dont trois des plus grandes de toute l’Europe nazie, et l’Allemagne se saigne aux quatre veines pour maintenir à niveau l’approvisionnement en gas-oil nécessaire aux diesels des U-Boote [14]. Hitler décide de prélever des divisions sur la poche de Courlande pour les transporter par mer jusqu’en Prusse-Orientale.

 

 

 

La base sous-marine de Gotenhafen [15], en Prusse-Occidentale.

 

Le 20 janvier, tandis qu’Hitler est en train d’ajuster sa stratégie, deux nouvelles armées d’Ivan Koniev franchissent à leur tour la frontière silésienne. Ce dernier peut maintenant ambitionner d’entrer dans Breslau [16], la capitale de ce poumon houiller et industriel qui nourrit les forces armées nazies.

 

La même journée, les soldats de Rokossovski commencent à s’aventurer dans l’intérieur du territoire prussien. Ils y prennent une ancienne forteresse des chevaliers teutoniques devenue une ville de vingt mille habitants, une quinzaine de kilomètres derrière la frontière allemande.

 

Le lendemain, dans l’est de la Prusse, le coup de collier des frontoviks de Tcherniakhovski leur vaut de pénétrer dans Gumbinnen [17].

 

Pendant que Tcherniakhovski, les mains en sang, commence enfin à pousser le groupe d’armée Centre vers Königsberg, que Rokossovski, de son côté, progresse dans le sud de la Prusse-Orientale tout en étendant lentement son bras gauche dans le nord de la Pologne, Joukov, dans l’intérieur des terres, éperonne le marathon frénétique de ses deux armées blindées, elles-mêmes talonnées par ses autres armées qui semblent leur livrer une véritable course de vitesse. Les chars du redoutable général Mikhaïl Katoukov, tout premier commandant de blindés de la Seconde Guerre Mondiale à avoir stoppé une division de panzers en 1941, sont à vingt kilomètres de Posen [18], la capitale même du Wartheland.

 

 

L’opération HANNIBAL ou la destinée du S-13

 

Hitler, debout les sourcils froncés devant ce chambardement, garde les yeux soudés à la Prusse-Orientale et à ses sous-marins. Il fait accourir à la chancellerie le commandant suprême de la Kriegsmarine et l’âme de la U-Bootwaffe, l’amiral Karl Dönitz. Gravement, les deux hommes déplient la carte ; la situation leur saute aux yeux : c’est bien la côte de la Baltique que visent les forces de Rokossovski, et donc l’encerclement de la Prusse-Orientale. Même les bases navales de Prusse-Occidentale voisine, Dantzig et Gotenhafen, sont menacées. C’est à cet instant qu’Hitler et Dönitz prennent la décision qui va faire entrer le S-13 dans l’histoire et qui va marquer toute l’existence de Stanislav Alexandrovitch Zvezdov : toute la flotte sous-marine des bases prussiennes doit partir pour l’ouest. Les U-Boote eux-mêmes voyageront par leurs propres moyens. Les personnels, dont ceux des écoles, seront transportés par les navires de surface. Toutes les bases abandonnées en Prusse doivent sauter, Dantzig et Gotenhafen comprises ; Memel, en Lituanie, sautera elle aussi [19].

 

 

 

L’amiral Karl Dönitz (de face), discret mais inébranlable fidèle d’Hitler, dans le feu de la conversation avec (de gauche à droite) le Maréchal Wilhelm Keitel, chef d’état-major de la Wehrmacht ; le Maréchal Hermann Göring ; le Reichsführer SS Heinrich Himmler et Martin Bormann, successeur de Rudolf Hess, lui-même successeur d’Hitler à la tête du parti nazi.

 

 

Tous les navires que l’amiral Dönitz aura pu affréter participeront à cette transhumance maritime d’une ampleur considérable. Ils puiseront dans les précieux stocks de gas-oil du Reich mais aussi sur ses stocks de charbon soudain rendus précieux à leur tour par la proximité des soldats de Koniev en Silésie. S’il reste de la place à bord, on y ajoutera des soldats de la Wehrmacht blessés ou des civils allemands. Ils prendront la mer à partir des ports de Pillau, en Prusse-Orientale, et Hel, Dantzig et Gotenhafen en Prusse-Occidentale [20]. Nom de code de l’opération : HANNIBAL.

 

HANNIBAL va déclencher un chaos apocalyptique dans les ports de Prusse puisqu’aux personnels de la Kriegsmarine vont s’agglomérer non seulement ceux de l’administration nazie mais en outre, effectivement, les soldats de la Wehrmacht blessés au front ainsi que les nuées de civils allemands qui fuient devant l’opération PRUSSE-ORIENTALE : dans la nuit qui suit la conférence, le Gauleiter Erich Koch constate que seules quelques dizaines de kilomètres ne séparent plus sa capitale, Königsberg, des frontoviks de Tcherniakhovski. Il file prudemment à la gare pour s’installer à bord de son confortable train personnel qui, bientôt, s’ébranle en direction de Pillau, cinquante kilomètres plus à l’ouest.

 

La suite en ligne prochainement…

 

Pierre Bacara

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[1] Paris a également été libérée par la 4e division d’infanterie américaine, régulièrement oubliée par les manuels scolaires français pourtant habitués à présenter la défaite de la Wehrmacht comme une victoire militaire américaine. [Retour au texte]

 

[2] …et non onze comme il l’affirme dans un lapsus du début de l’entretien, confondant à l’évidence son âge à l’éclatement de BARBAROSSA avec celui qu’il avait à l’éclatement de la Seconde Guerre mondiale en Europe en 1939. [Retour au texte]

 

[3] … et non le 16 novembre comme il l’affirme – apparemment par lapsus. Il semble en tout cas que les événements de cette journée du 16 soient restés gravés dans sa mémoire. [Retour au texte]

 

[4] A cette différence près que son équipage l’ignore encore puisqu’un mois plus tôt, il restait encore, dans les ports soviétiques de la mer Baltique, deux derniers représentants de la classe S : le S-4 et le S-13. Le S-4 est parti en patrouille en décembre. Aux dernière nouvelles, il a signalé, le 1er janvier, avoir prononcé une attaque – dépourvue de succès – contre un patrouilleur de la Kriegsmarine au large de Pillau (aujourd’hui Baltiisk en Fédération de Russie). Depuis, on n’a plus de nouvelle de lui. Et pour cause : dans la nuit du 6 au 7, il a été mortellement éperonné par le torpilleur allemand T-3, emportant tout son équipage dans la tombe. Depuis, le S-13 est, dans les faits, le tout dernier survivant de sa classe en mer Baltique. D’une manière générale, comme le rappelle Stanislav Zvezdov lorsqu’il évoque les « peines et les épreuves » endurées par les sous-mariniers soviétiques au cours de la Seconde Guerre mondiale, les pertes des submersibles soviétiques ont été très élevées : plus de la moitié du total des bâtiments engagés. [Retour au texte]

 

[5] Hanko, d’où appareille le S-13, n’est qu’une base secondaire de la flotte sous-marine soviétique de la Baltique. Sur les côtes finlandaises, la base principale de la flotte est installée aux chantiers navals de Turku, d’où appareillent presque simultanément, sur une période de quarante-huit heures, le Chtch-407 (Щ-407) et le Chtch-318 (Щ-318). Le Chtch-407 a pour zone d’opérations le golfe de Dantzig (aujourd’hui Gdansk, en Pologne) au large de la Prusse-Occidentale. Le Chtch-318 part pour les eaux du port de Memel (Klaipeda en lituanien), qui ravitaille la poche allemande du même nom. Le Chtch-307 (Щ-307), également basé à Turku, a appareillé quelques jours plus tôt en direction des eaux du port de Libau (Liepaja en letton), l’un des deux ports de ravitaillement du groupe d’armées Nord allemand qui occupe la poche de Courlande. Le M-90, qui patrouillait dans le golfe de Finlande, reçoit l’ordre de partir pour les eaux de Windau (Ventspils en letton), l’autre port de ravitaillement du groupe d’armées Nord. A une date inconnue, le L-3, lui aussi basé à Turku, prend la même route que lui. Le S-4, dont nous n’avons pas réussi à localiser le port d’attache, est déjà à pied d’oeuvre dans le golfe de Dantzig. Enfin, le K-51, basé à Hanko ou à Helsinki, doit ultérieurement lever l’ancre pour les eaux de Kolberg (aujourd’hui Kolobrzeg en Pologne), en Poméranie. La présence du Chtch-310 (Щ-310) est également signalée début janvier dans les eaux de Memel, mais non confirmée.

Au large des côtes baltiques tenues par la Wehrmacht et même loin sur leurs arrières, c’est donc une flotte constituée d’entre huit et dix sous-marins soviétiques qui opère en janvier, déployée de la Poméranie à la Courlande, ce qui représente un arc d’interception s’étendant sur plus de six cents kilomètres.

[Retour au texte]

 

[6] Stricto sensu, c’est déjà fait : depuis le mois d’octobre 1944, les forces soviétiques tiennent une « véranda » de quatre-vingt-dix kilomètres de large qui mord sur la frontière est de la Prusse-Orientale, mais seulement sur une profondeur d’une vingtaine de kilomètres. De même, à l’Ouest, les Américains tiennent la ville frontière d’Aix-la-Chapelle et ses environs, sur une profondeur de dix kilomètres et une largeur de vingt. [Retour au texte]

 

[7] Dans les vingt-quatre heures qui ont suivi le déclenchement du cataclysme de l’opération BARBAROSSA contre l’URSS le 22 juin 1941, Staline a doté les forces armées soviétiques d’un conseil restreint chargé de prendre les décisions les plus importantes et de définir les grandes lignes de leur application, en amont de l’état-major général chargé des les appliquer. Les décisions et leur application étant des processus complexes, de très grande envergure et étroitement liés entre eux, les membres les plus écoutés de la Stavka sont souvent également membres de l’état-major général. Le mot n’est pas un acronyme car en russe, c’est un nom commun qui signifie littéralement « la tente ». [Retour au texte]

 

[8] Dans l’Armée rouge, le terme « front » possède deux sens totalement distincts l’un de l’autre. Le premier est commun à toutes les armées : la ligne le long de laquelle les forces belligérantes se sont face. Le second signifie « groupe d’armées ». Les auteurs francophones lèvent l’ambiguïté en écrivant le mot avec une majuscule lorsqu’il est utilisé dans son sens organique de « groupe d’armées », et avec une minuscule dans son sens géographique de « ligne de contact ». C’est dans ses deux significations différentes que le terme est utilisé ici. [Retour au texte]

 

[9] Aujourd’hui Gdansk, en Pologne. [Retour au texte]

 

[10] La ville-forteresse de Königsberg est la capitale historique de l’ordre militaire allemand des Chevaliers teutoniques qui, au XIIIe siècle déjà, a tenté d’envahir les principautés russes. Il a fallu deux ans de combats au prince de Novgorod Alexandre Nevski pour parvenir à les arrêter à la bataille du lac Peïpous, mise en scène en 1938 par le réalisateur Sergueï Eisenstein dans son monument de l’histoire du cinéma mondial, Alexandre Nevski. Trois ans avant l’éclatement de l’opération BARBAROSSA en 1941, des dizaines de millions de spectateurs soviétiques avaient vu au cinéma les images de la lutte contre ces guerriers germaniques aux croix noires. Cinq siècles après Alexandre Nevski, c’est encore à Königsberg qu’a été couronné le roi de Prusse Frédéric II le Grand, souvent perçu comme le père du militarisme prussien. [Retour au texte]

 

[11] frontovik : terme russe générique signifiant « combattant du front », souvent utilisé par abus – comme ici – pour désigner les fantassins. [Retour au texte]

 

[12] Pendant les années de lutte du parti nazi pour l’accession au pouvoir, Hitler a divisé l’Allemagne en régions appelées Gaue (Gau au singulier), chacune dirigée par un Gauleiter, sorte de tentacule locale du Führer. En 1933, à la prise de pouvoir des nazis, la fonction de responsable politique régional des Gauleitern s’est doublée de la charge de gouverneur administratif. La Prusse-Orientale est l’une de ces régions. [Retour au texte]

 

[13] Au sujet de ce dernier, signalons une erreur de la part de notre marin. Au cours de l’entretien, il affirme que la mission du S-13 s’inscrit dans le cadre d’une opération soviétique « contre le groupe d’armées Courlande ».

A l’évidence, Stanislav Alexandrovitch confond l’opération PRUSSE-ORIENTALE avec l’opération MEMEL qui, au mois de novembre, à réussi à acculer le groupe d’armées Nord nazi contre la région côtière de la Lettonie – la Courlande, effectivement – en le coupant du groupe d’armées Centre. Par la suite, l’Armée rouge n’a plus lancé et ne lancera plus d’offensive contre la poche de Courlande. La Stavka mise sur l’opération PRUSSE-ORIENTALE, et donc sur un déplacement vers l’ouest du front principal allemand, pour creuser l’éloignement de la poche de Courlande au point de transformer les forces puissantes qu’elle concentre en une perte sèche pour la Wehrmacht. Aux portes de la Courlande, le Premier Front de la Baltique se contente donc de monter la garde. Quant au terme de « groupe d’armées Courlande », s’il entrera bel et bien en vigueur, ce n’est pas encore le cas à l’heure où le S-13 inaugure sa patrouille au large des côtes prussiennes. L’erreur de notre témoin s’explique sans doute par sa situation au sein des événements : les coursives d’un sous-marin à des dizaines de kilomètres des côtes du continent ne sont pas le point d’observation idéal des opérations terrestres, d’autant moins que celles de l’Armée rouge sont les plus complexes de la Seconde Guerre Mondiale.

[Retour au texte]

 

[14] A ce moment-là, le réseau de bases sous-marines est ce que le Reich possède encore de plus vaste. Il s’étend de la France (La Rochelle et Saint-Nazaire qui constituent des poches lourdement défendues) à la Norvège (Bergen, Trondheim, Narvik) en passant par tout le glacis qui s’étend sur mille kilomètres depuis Wilhelmshaven, sur la mer du Nord à cent kilomètres des Pays-Bas, jusqu’à Libau (aujourd’hui Liepaja), en Lettonie. [Retour au texte]

 

[15] Aujourd’hui Gdynia, en Pologne. [Retour au texte]

 

[16] Aujourd’hui Wroclaw, en Pologne. [Retour au texte]

 

[17] Aujourd’hui Goussev, enclave de Kaliningrad, Fédération de Russie. [Retour au texte]

 

[18] Aujourd’hui Poznan, en Pologne. [Retour au texte]

 

[19] Aujourd’hui Klaïpeda, en Lituanie. [Retour au texte]

 

[20] Pillau, aujourd’hui Baltiisk dans l’enclave de Kaliningrad ; Hel, aujourd’hui Hela en Pologne. [Retour au texte]

 

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Sources principales :

 

 

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BAECHLER, Christian : Guerre et exterminations à l’est, Hitler et la conquête de l’espace vital, Paris, 2012

 

BUFFETAUT, Yves : La guerre navale en Baltique, Batailles octobre-novembre 2007

 

BUFFETAUT, Yves : La Kriegsmarine face aux Russes, Militaria hors-série, printemps 2015, L’effondrement du IIIe Reich

 

GLANTZ, David M. : Mythes et réalités du front de l’Est, Champs de bataille thématique février-avril 2014

 

GLANTZ, David M. : When Titans Clashed, How the Red Army Stopped Hitler, Lawrence, Kansas, Etats-Unis, 1995

 

LIARDET, Jean-Philippe : Prusse-Orientale janvier-avril 1945, Champs de bataille janvier-février 2007

 

LOPEZ, Jean : L’odyssée du XXIVe Panzerkorps, la résilience des unités allemandes et Tempête rouge à l’est, les offensives géantes soviétiques, Axe & Alliés mars-avril 2010

 

LOPEZ, Jean : Les cent derniers jours d’Hitler, chronique de l’apocalypse, Paris, 2015

 

LOPEZ, Jean, et OTKHMEZURI, Lasha : Joukov, l’homme qui a vaincu Hitler, Paris, 2013

 

MANTOUX, Stéphane : La bataille de Moscou, Les dossiers de la 2e Guerre Mondiale hors-série, printemps 2013.

 

MANTOUX, Stéphane : U-Boote, du mythe à l’histoire, 2e Guerre Mondiale, mars-avril et mai juin 2016.

 

MIAGKOV, Mikhaïl Y. (dirigé par) : Атлас победы, Великая Отечеcтвенная Война 1941-1945 гг. Atlas de la victoire, la Grande Guerre patriotique 1941-1945 »), Просвещение (Prosviéchtchiénié), Moscou, 2016

 

MOROZOV Miroslav E., SVISSIOUK Alexandre G. et IVACHTCHENKO Viktor N. : Подводник 1 Александр Маринеско. Документальный портрет, « Sous-marinier numéro 1 : Alexandre Marinesko, un portrait documenté », Moscou, 2015

 

PONTIC, Nicolas : Der Ivan kommt ! La dernière campagne à l’Est et Gotterdämmerung, le crépuscule des dieux, 2e Guerre Mondiale thématique hiver 2008-2009.

 

PRIME, Christophe : La libération d’Auschwitz, l’horreur nazie prend fin, 2e Guerre Mondiale juin-juillet 2009

 

SANDMEYER, Peter : Das Drama der « Wilhelm Gustloff », Stern, 3 mars 2008

 

Sites web de référence :

 

Lexikon der Wehrmacht http://www.lexikon-der-wehrmacht.de

 

Uboat.net : http://uboat.net

 

United States Holocaust Memorial Museum https://www.ushmm.org

 

 

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